jeudi 17 novembre 2016

PARIS-PHOTO. 2016.

Paris-Photo 2016 - Vue d'exposition. Photo ©FDM.

Grande qualité pour cette nouvelle mouture de Paris-Photo, qui réussit le tour de force de présenter une large histoire de la photographie (depuis ses origines, au milieu du XIXe siècle…), tout en offrant un panorama de la photographie de l'ère moderne ou plus contemporaine (celle qui est en train de se faire et se penser).

Au détour des allées et des édicules, construits pour les galeries dans l'enceinte du Grand Palais, se nichent et s'organisent une grande variété de propositions.

Des "calotypes égyptiens" de John Beasley Greene (1832-1956) aux "Paysages millimétrés et foisonnants" de Stéphane Couturier (Melting Point, Bab-el-Oued Série, 2016) ; des Man Ray canoniques aux arbres (comme "animés") du coréen BAE Bien-U, la très riche aventure de la photographie (argentique et numérique) nous entraîne dans le carnaval des images.

Monde inéluctablement SINGULIER, parce qu'il greffe et abouche l'une à l'autre ce que l'on continue à nommer "LA RÉALITÉ" et l'ensemble des imaginaires foisonnants de ces hommes et ces femmes qui regardent le monde par le truchement de leur appareil photo.

"LA RÉALITÉ" est ainsi auscultée, dévoilée, travestie, poussée dans ses plus extrêmes retranchements par les expériences singulières des photographes d'autrefois (les anonymes et les grands noms) et des chercheurs (et "marcheurs de l'image") d'aujourd'hui.

Les déserts et les dunes d'Edward Weston (1886-1958), les mises en scène - animalières et autres - des grands noms de la photographie de mode (Cecil Beaton, Richard Avedon) font écho aux environnements et architectures recomposées de Georges Rousse (Chasse-Sur-Rhône, 2010) aux expériences "substantielles" de Patrick Bailly-Maître-Grand (Les "Maximiliennes", Galerie Baudoin Lebon) .

Présentées à la Galerie Caroline Smulders, les "Archives de Gérard Malanga" nous réintroduisent dans l'intimité des Warhol, William Burroughs, John Cage, Candy Darling…, dans le monde de l'underground new-yorkais de la Factory des années 1960.

Au détour d'une allée, les fameuses planches contacts peintes de William Klein nous attendent. Le noir et blanc "archétypique" de l'imaginaire photographique s'y heurte à la densité picturale de quelques traits vivement colorés : en bleu, en rouge, en jaune… LA RÉALITÉ, L'ACTUALITÉ d'hier y reprennent vie.

William Klein, L'enterrement de Jacques Duclos, Paris, 1975.
Courtesy Polka Galerie.

mardi 1 novembre 2016

AVEDON – Ainsi font, font, font…

Couverture de la revue Égoïste, N° 13, tome II.
Cirque du soleil. Clowns par Richard Avedon.

La France D’AVEDON. Vieux Monde. New Look.
Exposition à la BNF du 18/10/2016 au 26/02/2017
Commissaires de l’exposition :
Robert M. Rubin & Marianne Le Galliard

La « France d’Avedon » - essentiellement la Gentry parisienne – les stars du cinéma, de la mode, de la chanson, les écrivains et intellectuels en vogue, les leviers du monde de l’art et des affaires, les Catherine Deneuve, Jeanne Moreau, Françoise Sagan, Serge Gainsbourg, Bernard-Henri Lévy, Jean Dubuffet, François Pinault, Marguerite Duras (espiègle et « petite fille ») et bien d’autres défilent et se pressent les uns contre les autres sur les cimaises de la BNF.

« VIEUX MONDE. NEW LOOK. « Ainsi font, font, font les marionnettes d’Avedon… » - Telle une marionnette javanaise, Audrey Hepburn anime et réunit tout ce « GRAND PETIT MONDE ». Elle danse, virevolte, esquisse dans l’espace une gestuelle hiéroglyphique.

« Funny Face » (film de Stanley Donen, 1956, inspiré du parcours d’Avedon) et la série de clichés d’Avedon « Paris Pursuit » (avec Audrey Hepburn et Mel Ferrer, Harper’s Bazaar, 1959) servent de toile de fond à l’exposition. Monde de la mode, des journaux, des graphistes, des critiques, des « ÉLEGANTS ». Dans cet espace-là, tout va très vite. Cela bouge, danse et se transforme. – Avedon enregistre la parade et participe au film, Funny Face, sous la forme de ses fameux « arrêts sur images ».

L’exposition s’arrête sur un autre photographe : Henri Lartigue et la mise en page de son fameux Journal photographique (Diary of a Century, 1970). Avedon et Lartigue participèrent ensemble à l’entreprise d’édition deux années durant. L’ouvrage joua un rôle non négligeable dans la consécration de la brillante (et un temps discrète) carrière de Lartigue.

À partir de 1985, Avedon ajoute une autre aventure à sa propre « carrière parisienne ». Une collaboration à ÉGOÏSTE, époustouflant journal EN NOIR ET BLANC, paraissant une fois l’an et réunissant des textes d’écrivains et de photographes en vogue. Une sorte de pléiade de ce que le monde des medias pouvait – chaque année – aligner…

L’exposition de la BNF est serrée, serrée. Les photographies y retrouvent leur statut d’images ; elles sont là, réunies comme dans un collage. On y sent le « travail d’atelier », l’empilement, l’accumulation et la confrontation des tirages.

Cette accumulation des clichés, leur contiguïté rendent cet univers clownesque, presque grotesque, et l’on se prend à découvrir qu’Avedon pratiquait le rire (et la satire), lui qui savait si bien sauter, courir et se démener sur son plateau – « plateau » du monde et des médias, du paraître et du jeu…

TOUTE AUTRE est l’actuelle présentation de ces mêmes « AVEDON » dans le métro parisien. Au long des couloirs et sur les quais, j’y ai retrouvé l’Avedon que je connaissais. Au travers de ces clichés comme dépliés et développés dans l’espace urbain. L’agrandissement sous forme d’AFFICHES de ces photographies est somptueux.

L’aventure de ces grandes photographies est alors renouvelée. Car le métro passe devant ces images, les masque et les laisse ensuite réapparaître. La rame file, les usagers défilent, s’arrêtent – silhouettes graphiques et filiformes – disparaissent. — Catherine Deneuve et Jeanne Moreau rêvent ou nous contemplent. Nous les voyons de loin – sur le quai d’en face – ou de très près et de guingois. Le monde est en noir et blanc… et se COLORE de la réalité. La magie des images est surmultipliée.

Lien vers l'Exposition à la BNF

Lien vers Avedon dans le métro parisien

Lien vers Lartigue, un livre

« AVEDON » Vue d’exposition. Station Luxembourg (RER B).
Ph. ©FDM, 2016.